Madame Valérie Pécresse, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, m’a fait part de son intérêt pour l’idée d’un « Erasmus maritime » destiné aux étudiants de l’Union européenne.
C’est une très bonne nouvelle qui valide un peu plus ce concept.
Je rappelle que j’ai proposé à François Fillon, Premier ministre, d’étudier la possibilité de construire une série de dix voiliers-écoles du type Statsraad Lehmkuhl sur les chantiers STX de Saint-Nazaire, pour un budget global de 400 millions d’euros, afin de soutenir la construction navale.
Sur demande du Premier ministre cette proposition est étudiée par Hervé Morin, ministre de la défense, et Luc Chatel, Secrétaire d’Etat chargé de l’industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement.
Statsraad Lehmkuhl / longueur 98 mètres / nombre de cadets à bord : 150
La proposition de créer un « Erasmus maritime », pour les étudiants européens, n’a rien d’original, ou d’exceptionnel, car elle est déjà réalisée par la Marine Nationale qui développe un « Erasmus naval » depuis plusieurs années.
Afin de présenter cet « Erasmus naval », je reprends l’article paru le 11 avril 2008 dans Ouest France :
17 commandants étrangers à l'École navale
Pour cet événement inédit, qui rassemble à Lanvéoc 17 commandants des plus grandes écoles navales européennes et américaines, tous les pavillons des nationalités présentes ont été hissés sur le mât.
A Lanvéoc, ils débattent de l'avenir des élèves officiers des différentes marines européennes et de l'Otan.
À l'Ecole navale de Lanvéoc, 17 commandants des plus grandes écoles navales européennes et américaines sont réunis, cette semaine, pour débattre de l'avenir de la formation des élèves officiers des différentes marines européennes et de l'Otan (organisation du traité de l'Atlantique Nord).
Américains, Allemands, Anglais, Espagnols, Italiens, Polonais, Roumains et Finlandais, chaque commandant a présenté son école et ses formations. Et, surtout, amené de nouvelles propositions permettant l'échange d'élèves entre grandes écoles.
« Il faut s'ouvrir à l'international, voir des étrangers parmi les cadres, favoriser les liens forts tissés entre toutes ces nations , a lancé, enthousiaste, le contre-amiral Pierre Soudan, commandant de l'école navale de Lanvéoc. Ces échanges peuvent se caractérisent aussi bien par l'organisation pratique d'embarquements à bord de navires d'instruction que d'échanges complets de formation entre élèves. »
Regard neuf sur la Marine
Pour la première fois, la Roumanie participe à ces échanges, qui ont lieu tous les deux ans dans un pays différent. Depuis 15 ans, l'Allemagne envoie régulièrement ses élèves en formation à l'École Navale.
Le lieutenant de vaisseau allemand Jan Feuerbach, y encadre les élèves de son pays : « En plus d'une formation complète, ils s'imprègnent culturellement. On sent que les jeunes sont volontaires, ont envie de voyager, de découvrir d'autres mentalités. »
En témoigne le jeune Allemand Mickaël Adam, en première année à Lanvéoc : « C'est très enrichissant sur le plan personnel, on élargit notre propre horizon ».
L'élève-officier Guenoisrenchérit : « Humainement et techniquement, le fait de partager tous les aspects de la vie d'une promotion étrangère dans une autre marine et académie est sans aucun doute un moyen de prendre du recul. La logique de formation que l'on découvre permet de mieux appréhender une autre culture maritime. On porte également un regard neuf sur son pays, sa marine et son école. C'est une prise de conscience des qualités et défauts de chaque formation, des richesses qui leur sont propres. »
Sur fond de réforme de l'enseignement supérieur européen, cette conférence est aussi l'occasion de développer des synergies importantes, synonymes d'économies significatives pour les différentes écoles navales.
Cette conférence se conclura par la signature d'un protocole d'échange entre la France et l'Italie, dans le cadre du programme « Erasmus naval », initié par la Marine nationale, prolongeant ceux déjà signés, en particulier avec l'Espagne et les États-Unis.
Ouest-France
La crise financière, économique, sociale et politique, qui se développe depuis 2008 sur l’ensemble de la planète va créer des tensions entre les pays européens mais aussi entre les grands blocs constitués des pays asiatiques, des pays de l’Union européenne, ceux d’Afrique et du Maghreb, du Proche et du Moyen-Orient, ainsi que ceux d’Amérique du Nord et du Sud.
Ce type d’effondrement s’est toujours conclu dans l’histoire par des replis nationalistes mais aussi, très souvent, par des émeutes, des révoltes, des guerres.
Nous devons être conscients que notre avenir, et celui de la planète, ne sera garanti que si nous réussissons à effectuer, d’une façon pacifique, une transition vers un autre stade d’évolution planétaire et que, pour cela, nous devrons développer de nouvelles relations, de nouveaux équilibres entre les Etats, les régions et les individus.
A bord du Statsraad Lehmkuhl
Et l’un des aspects positifs d’un « Erasmus maritime » est de « rapprocher les jeunes Européens, mais aussi les jeunes Américains, Asiatiques, Africains, Maghrébins, etc.., par la navigation, en équipage, à bord de grands voiliers ». Car c’est d’abord les jeunes qu’il faut former afin que ceux, et celles, qui seront les élites planétaires de demain soient pleinement conscients de la dimension globale de chacun de leurs choix.
Et ce qui est vrai pour les étudiants des universités de l’Union européenne, et des autres universités de la planète, l’est encore plus pour les élèves-officiers des Marines ; et la volonté de l’amiral Pierre Soudan, commandant de l'école navale de Lanvéoc, de développer un « Erasmus naval » se révèle plus que jamais d’actualité.
Un « Erasmus naval », c'est-à-dire un « Erasmus des Écoles Navales européennes » doit être développé rapidement, et avec des moyens puissants, si nous désirons être capables de faire face aux défis cruciaux qui vont se révéler, les uns après les autres, dans les mois et les années qui viennent.
Aussi, ma proposition est de lancer le plus tôt possible la construction de grands voiliers-écoles du type Statsraad Lehmkuhl (ou autre / ex : Gorch Fock, Mir, Juan Sebastian de Elcano, etc…) pour les Écoles navales des Marines de l’Union européenne. Et, pour la France, je propose la construction de deux voiliers-écoles compte tenu de l’importance des promotions de l’Ecole Navale (120 élèves-officiers) et des échanges nécessaires avec les autres Ecoles européennes.
Dans la mâture 46 m au-dessus du pont (vidéo)
D’autre part, il faut souligner que cet « Erasmus naval » peut aussi être développé avec les Marines des pays asiatiques, du Proche-Orient et du Moyen-Orient, d’Afrique, d’Amérique du Nord et du Sud, et bien sûr de Russie. Ce serait une nouvelle activité maritime globale qui permettrait de faire baisser les tensions entre tous les pays de la planète.
Et compte tenu de la vitesse de la dégradation de la situation internationale ce projet me semble urgent.
Aussi urgent que d’avoir des moyens d’intervention conséquents pour neutraliser ou contrôler des pays qui sombreraient dans le chaos de guerres civiles ou céderaient, une fois de plus, aux régressions nationalistes ou communistes avec la création de camps d’extermination, ou de concentration, comme nous avons pu le voir lors de la dislocation de l’ex-Yougoslavie.
Notre Marine doit être puissante, mais aussi humaine, et ce sera le rôle d’un « Erasmus naval », réalisé avec les Marines de la planète, avec des grands voiliers-écoles, que de montrer que le développement des relations internationales militaires est un facteur de compréhension mutuelle, et donc de paix.
Jean-Charles Duboc
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