Drapeau Flux

Le Drapeau

 

Reprise d’un texte de « I-Cube » du 22 avril 2015

 

Je relaye, parce que c’est vraiment « trop drôle » !

 

Le Drapeau…

 

« Ils sont quinze cent mille qui sont morts pour cette saloperie-là.

Quinze cent mille dans mon pays, Quinze millions dans tous les pays.

Quinze cent mille morts, mon Dieu !

Quinze cent mille hommes morts pour cette saloperie tricolore…

Quinze cent mille dont chacun avait une mère, une maîtresse,

Des enfants, une maison, une vie un espoir, un cœur…

Qu’est-ce que c’est que cette loque pour laquelle ils sont morts ?

Quinze cent mille morts, mon Dieu !

Quinze cent mille morts pour cette saloperie.

Quinze cent mille éventrés, déchiquetés,

Anéantis dans le fumier d’un champ de bataille,

Quinze cent mille qui n’entendront plus JAMAIS,

Que leurs amours ne reverront plus JAMAIS.

Quinze cent mille pourris dans quelques cimetières

Sans planches et sans prières…

Est-ce que vous ne voyez pas comme ils étaient beaux, résolus, heureux

De vivre, comme leurs regards brillaient, comme leurs femmes les aimaient ?

Ils ne sont plus que des pourritures…

Pour cette immonde petite guenille !

Terrible morceau de drap coulé à ta hampe, je te hais férocement,

Oui, je te hais dans l’âme, je te hais pour toutes les misères que tu représentes

Pour le sang frais, le sang humain aux odeurs âpres qui gicle sous tes plis

Je te hais au nom des squelettes… Ils étaient Quinze cent mille

Je te hais pour tous ceux qui te saluent,

Je te hais à cause des peigne-culs, des couillons, des putains,

Qui traînent dans la boue leur chapeau devant ton ombre,

Je hais en toi toute la vieille oppression séculaire, le dieu bestial,

Le défi aux hommes que nous ne savons pas être.

Je hais tes sales couleurs, le rouge de leur sang, le sang bleu que tu voles au ciel,

Le blanc livide de tes remords.

 

Laisse-moi, ignoble symbole, pleurer tout seul, pleurer à grand coup

Les quinze cent mille jeunes hommes qui sont morts.

Et n’oublie pas, malgré tes généraux, ton fer doré et tes victoires,

Que tu es pour moi de la race vile des torche-culs.

 

1924 – Jean Zay »

 

Un texte sorti de la « guerre des tranchées », où il a su traduire par les mots ci-dessus l’écœurement que lui a inspiré cet épisode funeste de première guerre mondiale d’empires qui se consumaient dans un autodafé épouvantable…

C’était si terrible que même mes grands-parents ne m’ont jamais parlé de « leur guerre », la « der des der ».

Eux qui se sont battus pour ce fameux drapeau tricolore.

 

Jean-Zay, un « Rad-Soce » de l’entre-deux-guerres, assassiné par trois miliciens en 1944, une victime comme il y en eu des dizaines de milliers, hélas, durant la Seconde Guerre mondiale et réhabilité après-guerre, blanchi du crime de collaboration dont quelques ignobles l’accusaient à tort.

Il a servi comme sous-lieutenant au sein de la IVème armée « volontaire pour les missions les plus périlleuses et les plus délicates » en diront ses chefs, sans jamais « qu’à aucun moment il ne s’est soustrait à l’autorité militaire » en dira le 5 juillet 1945, la Cour d’appel de Riom qui annule le jugement du 4 octobre 1940 au motif que « les poursuites intentées contre le sous-lieutenant Jean Zay ne peuvent s’expliquer que par le désir qu’a eu le gouvernement d’atteindre un parlementaire dont les opinions politiques lui étaient opposées et qu’il importait de discréditer en raison de la haute autorité attachée à sa personnalité ».

Elle le réhabilite pleinement à titre posthume.

Je ne sais même pas si le Général De Gaulle, condamné à mort pour haute-trahison en 1940 a pu être réhabilité…

 

Depuis, signalons que « l’outrage au drapeau » est devenu un délit.

L'article 440 du Code de justice militaire dispose que : « Le fait pour tout militaire ou toute personne embarquée de commettre un outrage au drapeau ou à l'armée est puni de cinq ans d'emprisonnement. Si le coupable est officier il encourt, en outre, la destitution ou la perte de son grade. ».

Et puis ce délit d’opinion s’est déplacé aussi autour de l’hymne national.

Des polémiques ont pu voir le jour, comme dans les années 1970 lors de l'interprétation contestée de « La Marseillaise » par Serge Gainsbourg, mais ce n'est qu'à partir de 2003 que l'outrage au drapeau ou à l'hymne national est tombé sous le coup de la loi.

 

Et dire que moi, je pleure dès que j’entends la première mesure de « La Marseillaise » : Je reste un grand émotif au patriotisme chevillé à l’âme !

Et tout autant, de joie, quand visitant le bâtiment de l’ONU à New-York, j’ai vu « mon » drapeau tricolore flotter parmi tous les autres…

Gorge nouée quand je suis entré dans le hall d’accueil.

En plus, miracle des miracles dans ce territoire anglophone, les hôtesses d’accueil parlaient toutes un « Francilien-natif » sans aucun accent et de façon « fluide » : Merveilleux, j’étais chez moi !

À l’ONU… c’est vous dire mes larmes de joie.

 

Rappelons qu’en mars 2003, un amendement à la loi pour la sécurité intérieure présentée par le ministre de l'intérieur pas encore « Bling-bling », crée le délit « d'outrage au drapeau ou à l'hymne national ».

Ce sont les sifflets du public à l’occasion d’un match amical de football international qui provoque cette réaction législative…

Le drapeau n’y est pour rien…

 

L'article 133 de cette loi précise : « Le fait, au cours d'une manifestation organisée ou réglementée par les autorités publiques, d'outrager publiquement l'hymne national ou le drapeau tricolore est puni de 7.500 euros d'amende. Lorsqu'il est commis en réunion, cet outrage est puni de six mois d'emprisonnement et de 7.500 euros d'amende ».

L’auteur (UDF) de l'amendement, commente alors : « J'avais déposé une proposition de loi dès 1999 à la demande des anciens combattants, tombée dans l'oubli (...). Il a fallu les sifflets du match France - Algérie en 2001 pour que l'on s'en préoccupe. ».

Notez que le Conseil constitutionnel restreint la portée de la loi en précisant que les sanctions ne s'appliquent qu'aux « manifestations publiques à caractère sportif, récréatif ou culturel », et qu'en sont exclues les « œuvres de l'esprit » et « les propos tenus dans un cercle privé ».

 

Autrement dit, Jean Zay peut insulter mon drapeau sans même que j’aie rien à en dire, puisqu’il ne s’agit pas d’une « manifestation publique à caractère sportif, récréatif ou culturel », mais bien d’une « œuvre de l’esprit » : Il est juridiquement parfaitement conforme à la décision du « Cons-Cons ».

 

Mais le plus drôle est à l’initiative, en tout cas sous son égide, du gouvernement de « la gôche-triomphante » du moment, et aura lieu le 27 mai prochain, à l’occasion des commémorations en cours du centenaire de la Grande Guerre et du 70ème anniversaire de la libération de « mon pays à moi » du joug nazi.

Il sera l'une des quatre personnalités qui devraient être honorées par leur entrée au Panthéon !

Vous savez, le Panthéon dédié « Aux Grands hommes la Patrie reconnaissante »…

Les autres, à la limite, on n’en parle même pas dans les médias.

Vraiment splendide !

 

Certaines personnes affirment que sa mort ignoble, dans des circonstances rocambolesques (ses bourreaux miliciens se sont faits passer pour des résistants-déguisés afin de l’extraire de sa prison en juin 1944, avant d’aller l’achever dans un bois et de jeter sa dépouille dans une crevasse naturelle « rebouchée » à coups de grenade…) n’en fait pas l’égal de ces résistants âgés de 16 à 22 ans, presque l’âge qu’avait Jean Zay quand il a écrit son poème, qui se sont sacrifiés pour leur pays et son drapeau en s’écriant : « Je meurs pour ma Patrie» ou « Vive la France ! ». 

 

Et on se souvient encore de « Bling-bling » (quand il l’était enfin devenu…) qui voulait nous imposer Guy Moquet, militant communiste et poète à ses heures, qui nous aura laissé ces mots-là si émouvants :

« Ma petite maman chérie,

Mon tout petit frère adoré,

Mon petit papa aimé,

Je vais mourir !

(…) Certes j'aurais voulu vivre, mais ce que je souhaite de tout mon cœur c'est que ma mort serve à quelque chose.

(…) ma vie a été courte, je n'ai aucun regret si ce n'est de vous quitter tous.

(…) en vous embrassant de tout mon cœur d'enfant.

Courage !

(…) Guy »

Rappelons là encore que le 19 octobre 2009, le directeur général de l'enseignement scolaire indique que la lecture de la lettre de Guy Môquet reste « obligatoire »… 

 

J’avoue que dès lors, je ne peux pas résister à reprendre ce poème, au nom de la liberté d’expression et de la loi reconnue conforme à la constitution.

Et comme je suis très respectueux des lois de « Mon pays » (celui que j’aime tant…) et de celles de mes « pays d’accueil » (même et surtout fiscales…), c’est avec plaisir que je m’exécute moi-même…

 

Mais avouez qu’on aurait pu espérer des « trisomiques-autistes » qui nous gouvernent encore pendant 2 ans, qu’ils sachent éviter une polémique inutile, laissant du temps au temps, en lui laissant faire son œuvre d’apaisement.

Eh bien même pas : Ils ont l’air si pressés de se faire « mal-aimés », qu’on croirait presqu’ils ne comptent pas s’éterniser là où ils sont…

J’adore la perspective !

 

Source :

http://flibustier20260.blogspot.fr/2015/04/je-relaye-parce-que-cest-vraiment-trop.html

 

 Reprise du site CNRS Le Journal

 

 Mercredi 11 février 2015, à Orléans, le CNRS rend hommage à Jean Zay, illustre ministre de l’Éducation nationale et artisan de la création du CNRS, dont les cendres entreront bientôt au Panthéon.

L’historien Antoine Prost dresse le portrait de ce grand homme, victime de ses engagements et de ses convictions, arrêté par le régime de Vichy et assassiné par des miliciens.

 

La panthéonisation de Jean Zay honore à la fois le grand ministre de l’Éducation nationale du Front populaire et le républicain décidé à résister à Hitler, victime de ses engagements et de ses convictions.

 Né en 1904 à Orléans, d’un père journaliste et d’une mère institutrice, Jean Zay avait commencé une brillante carrière d’avocat avant d’être élu député en 1932, à 28 ans. Il fut l’un des artisans du ralliement du Parti radical-socialiste au Front populaire. Sous-secrétaire d’État à la présidence du conseil depuis janvier 1936, réélu en mai, il avait fait le lien entre le gouvernement sortant qui expédiait les affaires courantes et le nouveau gouvernement, qui ne pouvait être investi que début juin. Mais les affaires courantes ne l’étaient guère : c’étaient les grèves et les occupations d’usine. Ces circonstances exceptionnelles permirent à Léon Blum d’apprécier son intelligence et son sens politique. Aussi lui confia-t-il l’Éducation nationale ; il n’avait pas encore 32 ans. Il y réussit si bien qu’il fut reconduit jusqu’à sa démission, à la déclaration de guerre.

 

 La culture et le sport entrent à l’école

 Jean Zay a laissé au ministère de l’Éducation nationale un souvenir lumineux. Il est le seul qui ressorte dans la grisaille des ministres de l’entre-deux-guerres. Sa réussite s’explique par la conjonction d’un projet et d’un style, nous dirions un mode de gouvernance. Le projet est celui des républicains : prolongation de la scolarité et démocratisation. Le style est pragmatique et libéral : il ne réforme pas d’en haut, il fait appel à la base, expérimente, mobilise, puis encadre et réglemente.

 La prolongation de la scolarité est décidée par une loi du 9 août 1936, qui porte, dès la rentrée, l’obligation scolaire de 13 à 14 ans. Au lieu de définir aussitôt par circulaire le contenu et les programmes de cette année de fin d’études primaires, Jean Zay laisse « toute liberté d’initiative » aux instituteurs. Il se contente de leur fixer la triple mission d’assurer dans ces classes un complément d’instruction, une initiation à la culture et une orientation professionnelle. Les programmes viendront plus tard. Il agit de même pour introduire trois heures d’éducation physique dans le primaire : il lance une expérimentation dans trois départements, puis dans vingt-neuf. Les activités dirigées, les classes promenades, l’étude du milieu par l’observation active sont développés de la même façon, avant d’être intégrées à de nouvelles instructions officielles en septembre 1938.

 La démocratisation consistait à mettre fin à la structure de classe de l’enseignement français. Il y avait à l’époque deux filières cloisonnées, le primaire pour le peuple, le secondaire pour les classes privilégiées. Un tout petit secondaire d’ailleurs : 10 000 professeurs et 250 000 élèves. Le secondaire avait son propre primaire, payant : les petites classes, de la 12e à la 7e, qui représentaient près du tiers des élèves. Le primaire avait développé son propre secondaire, gratuit, avec les cours complémentaires et les écoles primaires supérieures, de la même façon qu’aujourd’hui les lycées ont développé leur propre supérieur, avec les classes préparatoires et celles de techniciens supérieurs. Le projet consistait à unifier l’enseignement élémentaire, pour créer un premier degré, et à organiser un second degré diversifié, incluant les anciennes classes primaires supérieures. Le remplacement des anciennes désignations primaire et secondaire par les nouvelles, premier et second degrés, n’est pas une coquetterie linguistique : elle signe un changement de structure.

 

 Un souffle nouveau sur l’Éducation nationale

 Ce projet de loi déposé en mars 1937 a beaucoup heurté les défenseurs du secondaire traditionnel, puissants à la Chambre, qui l’ont de fait enterré : en septembre 1939, il n’avait toujours pas été discuté. Mais Jean Zay n’avait pas attendu pour réaliser par décret ce qui pouvait l’être. Il a réorganisé l’administration centrale, avec une direction du premier degré, compétente pour les petites classes des lycées, et une direction du second degré, compétente pour l’enseignement primaire supérieur. Il a donné des programmes communs aux quatre années d’enseignement primaire supérieur et au premier cycle du second degré, préfigurant ainsi nos collèges. Il a surtout expérimenté une classe de 6ed’orientation, avec l’objectif de proposer aux familles une orientation entre le classique, le moderne et le technique. C’était un « tronc commun » d’où devaient partir les branches. Pour cela, il fallait observer les élèves, et donc leur proposer une gamme plus large d’exercices, et un fonctionnement différent, avec des études de milieu, du travail d’équipe, des activités artistiques et manuelles. Cette innovation a été préparée par un stage, suivie et analysée. Les leçons qui en ont été tirées ont présidé après la guerre à l’organisation des classes nouvelles, qui constituent sans doute ce que la France a fait de mieux en matière de pédagogie.

 Jean Zay a ainsi fait passer sur l’Éducation nationale un souffle nouveau. Ce fut un des rares ministres à laisser un souvenir, dont témoignent les écoles, collèges et lycées qui ont pris son nom. Et de ce bon souvenir, il a lui-même reçu le témoignage. Dans une lettre de septembre 1939, alors qu’il a rejoint l’armée, il écrit : « Souvent des universitaires, des instituteurs anonymes sortent des rangs pour me serrer la main. Quatre ans de gouvernement ne m’ont rien procuré dont je puisse être plus fier. » Et Célestin Freinet lui décerne un compliment d’autant plus remarquable qu’il en est avare : « Si nous avions, dans l’histoire de l’évolution scolaire française, quelques lustres aussi riches en innovations hardies que les deux dernières années, il y aurait bientôt quelque chose de changé dans l’éducation française. »

 Mais Jean Zay ne s’est pas limité à l’éducation. Il a jeté les bases d’un réseau de centres d’orientation, en rendant obligatoire la consultation d’un centre avant tout contrat d’apprentissage. Il a aussi fondé la politique de recherche, avec comme secrétaires d’État d’abord Irène Joliot-Curie, puis Jean Perrin, et le début d’une administration. C’est lui qui a fondé le CNRS, même si le décret de création est signé par son successeur un peu plus tard. Comme ministre de l’Éducation nationale, il était en outre chargé des Beaux-Arts, de ce qui relève aujourd’hui de la Culture, et il a multiplié les initiatives, créant la réunion des théâtres nationaux, le musée des arts et traditions populaires et le festival de Cannes, qui aurait dû avoir lieu pour la première fois en septembre 1939 s’il n’y avait eu la guerre.

 

 Condamné par le régime de Vichy

 On connaît la fin sinistre de l’histoire. Dans le gouvernement de l’époque, qui signe les accords de Munich, Jean Zay est partisan de faire face à l’Allemagne hitlérienne. En septembre 1939, alors qu’il pouvait rester ministre, il démissionne et rejoint l’armée comme sous-lieutenant du train. Apprenant que les Chambres se réunissent à Bordeaux, il s’y rend et, le gouvernement ayant décidé de poursuivre la lutte depuis l’Afrique du Nord, il s’embarque sur le Massilia pour gagner le Maroc, le président de la République devant rejoindre Port-Vendres puis Alger. Mais Laval retourne le Président, le gouvernement renonce à son projet de résistance et le vote du 10 juillet 1940 donne les pleins pouvoirs à Pétain. Arrêté au Maroc, transféré en France, Jean Zay est condamné par un tribunal militaire à la réclusion à perpétuité pour« abandon de poste en présence de l’ennemi », alors qu’au moment où il avait quitté son unité, avec l’accord de ses chefs, les Allemands étaient 90 kilomètres de là ! C’était un jugement purement politique. Le régime de Vichy réglait son compte à un juif – il ne l’était pas, mais la propagande antisémite l’avait pris pour cible –, à un franc-maçon, au grand maître d’une université dont il rendait les instituteurs pacifistes responsables de la défaite, au républicain du Front populaire qui avait voulu résister à Hitler.

 

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