Commission d’indemnisation des Nations-Unies (CINU) : communication du 23 janvier 2014
Histoires Corses, les vraies : « Macagna » de Dumè.

Hommage à Jean-Edern Hallier

 

A la suite de la note « Lettre humoristique à Edwy Plenel », « Jo » a fait ce commentaire :

« Drôle d'idée que de s'adresser à Edwy Plenel concernant un sujet aussi grave.

Sans vouloir amalgamer la rédaction de Médiapart à l'un de ses fondateurs, on se souviendra concernant M. Plenel, alors directeur de la rédaction du Monde, de sa brillante prestation vis-à-vis de Denis Robert lorsque que celui-ci révèle péniblement l'affaire Clearstream (la vraie, celle qui concerne une chambre de compensation luxembourgeoise d'envergure internationale, pas le feuilleton de série Z franco-gaulois opposant Sarkozy et de Villepin) :

http://www.acrimed.org/article3735.html

Une belle marque de courage et d'intégrité.

Vous vous adressez aux mauvaises personnes, cher Ami-râle... »

 

Il est possible que le comportement d’Edwy Plenel soit parfaitement critiquable, mais ma première réaction au commentaire de « Jo » a été de considérer qu’Edwy Plenel était ῝mauvais῝, comme tous les ῝autres῝ !...

Comme tous les autres journalistes qui ont couvert le détournement, par François Mitterrand et quelques complices, des 15 milliards d’euros d’indemnités attribuées à la France par le Koweït, l’Arabie Saoudite, et les Emirats Arabes-Unis, au titre des frais de guerre relatif à l’Opération Daguet.

Et puis, je me suis dit que, là, il y avait quelque chose qui ῝clochait῝…

Comment une telle infamie est-elle possible ?...

En fait, cela signifie qu’une suite d’événements s’étalant sur plus de trente ans, a muselé les journalistes.

C’est aussi simple que cela.

Le premier de ces événements est le ῝suicide῝ de Robert Boulin.

Mais il y en a eu d’autres, comme les ῝suicides῝ de Pierre Bérégovoy et François de Grossouvre.

Progressivement, le premier des contre-pouvoirs s’est effacé face à un niveau de corruption, d’exigence de soumission, de peur, de crainte, atteint dans aucune autre grande démocratie de la planète.

Et puis, j’ai pensé à la disparition de Jean-Edern Hallier, qui ne m’avait pas plus troublé que cela il y a une quinzaine d’années.

 

Jean-Edern Hallier, écrivain polémiste, pamphlétaire, journaliste, critique littéraire, animateur de télévision, est né le 1er mars 1936 à Saint-Germain-en-Laye.

Il est décédé le 12 janvier 1997 à Deauville.

Jean-Edern Hallier est le fils du général André Hallier (1892-1988), héros de la Première Guerre mondiale, qui possédait un manoir familial à Edern dans le Finistère, et de Marguerite Leleu (1903-1984), d'origine protestante alsacienne.

Se situant à ses débuts dans la mouvance du nouveau roman, celui qui fut directeur de « Tel Quel » en 1960, en est exclu en 1963, à la suite d'une virée rocambolesque de Philippe Sollers, dans sa famille, en Suisse.

Après de multiples péripéties, Hallier a hébergé en 1977 la première radio pirate déclarée — « Radio Verte », de tendance écologiste — qui fera beaucoup parler d'elle en tant qu'écho d'un phénomène nouveau.

Dans la lignée des événements de Mai 68, il a également créé en octobre 1969 le journal satirique « L'Idiot international » - patronné à ses débuts par Simone de Beauvoir qui, par la suite, prendra ses distances avec le journal -, ce qui vaudra plus tard à Hallier d'être accusé d'entretenir un réseau « rouge-brun ».

Aux yeux de certains journalistes, le polémiste était d'autant plus suspect qu'il avait, depuis quelques années, entamé un dialogue avec Alain de Benoist, publiant notamment un de ses essais aux éditions Libres-Hallier : Les Idées à l'endroit (1979).

En 1982, l'écrivain est soupçonné d'avoir simulé son propre enlèvement et commandité un attentat contre l'appartement de Régis Debray.  Les sources de ces faits rapportés sont nombreuses : récemment l'auteur de sa biographie a confirmé le fait, ainsi que Gilles Ménage.

Un authentique ῝allumé῝ !...

En juin 1991, National Hebdo affirme que Jean-Edern Hallier va rallier le Front national. Dans un entretien accordé au Monde, l'écrivain dément, mais ajoute : « Le Pen représente beaucoup de Français de la France profonde. Il faut réconcilier Doriot et Thorez », tout en se déclarant « de gauche ».

Critique littéraire, il est également animateur d'émissions littéraires sur Paris Première avec le « Jean-Edern's Club », où il se permettait tout, même de jeter les livres par-dessus son épaule ou dans une poubelle, et sur M6, avec « A l'ouest d'Edern »…

 

Le pamphlétaire, alors en villégiature à Deauville (Normandy Barrière), meurt le matin du 12 janvier 1997.

A ce sujet, je reprends un article de Harware.fr :

Il enfourche sa bicyclette pour rallier le Cyrano, bar des jockeys. Toujours très entouré, cette escapade matinale, est l’un des très rares moments de solitude du polémiste.

En guise de petit-déjeuner, un viandox. C’est sur le chemin du retour, peu avant 8 heures que se produit l’accident. Sans témoins. C’est l’employé d’un casino qui découvre son corps. Son visage face contre le bitume baigne dans une mare de sang.

Des ecchymoses sur le dessus des mains laissent à penser qu’il n’a pas eu le réflexe de se protéger lorsqu’il a chuté, sans doute déjà inconscient. « Malaise cardiaque » pour les uns, « embolie cérébrale » pour d’autres, autant d’hypothèses qui ne seront jamais confirmées. Faute d’autopsie.
 
Une autopsie relève de l’autorité judiciaire lors d’un accident sur la voie publique. Elle est réclamée par le Parquet dans le cas d’une mort brutale ou simplement suspecte. N’importe quel quidam un tant soit peu connu a droit à son autopsie. C’est le privilège de la notoriété, une façon pour les autorités de se prémunir contre les rumeurs qui accompagnent souvent le décès d’une « personnalité ».
 
Hallier n’y a donc pas droit. On prend quand même soin de lui pourtant.
 
Moins de deux heures après son décès, ses proches ont la surprise de constater que son visage a été embaumé à la morgue. Il est comme « plâtré ». Initiative prise sans autorisation de la famille, par on ne sait qui, avec pour seule explication le souci de le rendre « présentable ».
 
Au même moment, sa suite de l’hôtel Normandy reçoit beaucoup de visiteurs. Un mystérieux policier qui exhibe une carte tricolore, d’autres non identifiés mais bien renseignés.

Dans la confusion des allées et venues qui suivent le décès, disparaissent du coffre de sa chambre une importante somme d’argent (1 million de francs), un dessin de Picasso et plusieurs dossiers confidentiels concernant ses têtes de turcs préférées : Mitterrand, Dumas et quelques autres. Indélicatesse d’un proche ? Barbouzerie ? Aucune enquête ne s’attachera à l’élucider.

Toutes les plaintes déposées par sa garde rapprochée et notamment pour « assassinat » sont classées sans suite sous des prétextes divers.
 
Mais y a-t-il une affaire Hallier ? Pas pour la presse.

Pourtant habituellement friande de « mort mystérieuse », elle traite cette disparition comme un non-événement.

Depuis des années sa religion est faite. Mythomane, maître chanteur, alcoolique, mégalo, escroc, le triste sire ne mérite guère que l’on s’attarde sur son cas.
 
Voilà le portrait que dresse Dominique Jamet : « Menteur, mythomane, escroc, plagiaire, comploteur, cynique, voyou. Hallier n’avait pas l’ombre d’une conviction. La bassesse conformiste de l’époque a seule fait de l’équipée de l’Idiot international, pépinière de talents, une aventure, la routine de la télévision a donné du relief à son émission littéraire. Ci-gît Jean-Édern Hallier, connu surtout par sa notoriété. »

Tontonphile notoire, Jamet sera remercié de sa fidélité par la présidence de la Très Grande Bibliothèque de France, mais c’est lui qui tient à souligner dans cette nécro la « bassesse conformiste » des années Mitterrand.
 
Pour le dixième anniversaire de sa disparition refait néanmoins surface dans plusieurs ouvrages.
 
Le plus captivant, « La mise à mort de Jean-Édern Hallier », n’est pas le plus chroniqué. Rien que de très normal. Ne commettant pas l’erreur de s’embarquer sur des hypothèses invérifiables, de vraies fausses pistes sur ce qui a pu se passer ou pas à Deauville ce 12 janvier, les auteurs Dominique Lacout et Christian Lançon se contentent, si l’on peut dire, de nous faire revivre la longue traque dont Hallier fut l’objet sous deux septennats sans que personne n’y trouve à redire.
 
Ils dressent en particulier l’inventaire effarant des moyens de l’État et d’ailleurs, mobilisés pendant ces années pour réduire au silence un homme qui, quoique puissent être par ailleurs ses diverses tares, y avait ajouté celle de refuser de se taire ou tout simplement de se soumettre.

Enjeu principal de ce duel, on le sait, la vie privée du chef de l’État, sa deuxième famille et bien au-delà son passé interdit : les relations avec Pétain, la Francisque, et encore son cancer que Jean-Édern Hallier avait tenté - sans succès - de mettre sur la place publique quelques semaines seulement après le 10 mai 1981, dans son bloc-notes du Matin de Paris.

L’homme le plus écouté de France.
 
Secrets de famille, secrets de jeunesse, secrets médicaux, que la raison d’État imposait à Mitterrand de préserver.

Hallier allait, plus tard, aggraver son cas en s’attaquant à quelques-uns des puissants barons de la mitterrandie.

Avec ceux-là Dumas, Kiejman, Lang, Hernu, Tapie, Charasse, Hallier n’avait jamais rien partagé. Mitterrand lui avait octroyé le privilège rare d’être son avocat, et c’est le même Mitterrand qui l’avait placé comme écrivain « au premier plan de sa génération ».
 
En vertu de quoi, Hallier sera l’homme le plus écouté de France. 640 écoutes téléphoniques illégales (prouvées !) pour la seule période du 4 septembre 1985 au 19 mars 1986 et réalisées par la fameuse cellule de l’Élysée dont la mission originelle consistait à lutter contre le terrorisme.

Femmes de chambre, imprimeurs, relations, bistrots fréquentés par l’écrivain, aucune ligne n’échappe ainsi à l’indiscrétion des hommes du Président.

Autant d’informations qu’il s’agit ensuite d’exploiter.

C’est l’ensemble des moyens de l’État qui est ainsi mis à contribution pour le réduire au silence. Les banques sont invitées à lui couper les vivres, le fisc à lui réclamer subitement de régler ses impôts. Éditeurs, imprimeurs sont eux informés des « risques » encourus à le publier…

La suite sur :http://forum.hardware.fr/hfr/Discussions/Actualite/jean-edern-hallier-sujet_71320_1.htm

 

En fait, la lecture de ce texte nous replonge dans une époque qui semble terriblement lointaine.

Celle où internet n’existait pas, et où le pouvoir se devait de maîtriser l’information à un niveau à peine imaginable aujourd’hui.

Je rappelle que peu de temps après la découverte du corps d’Edern-Hallier, il a été constaté que le coffre-fort de sa chambre d'hôtel — qui contenait des photocopies de documents concernant François Mitterrand et Roland Dumas — avait été vidé.

Son appartement parisien avait également fait l'objet d'une visite semblable.

Il devait déjeuner quelques heures plus tard avec le journaliste Karl Zéro, qui fut d'ailleurs appelé pour l'identification du cadavre.

L'hypothèse de son assassinat a été plusieurs fois avancée, notamment par son frère, Laurent Hallier dans une entrevue accordée à Christian Lançon pour le magazine Généreux en novembre 1998, ou par le même Christian Lançon et Dominique Lacout dans « La Mise à mort de Jean-Edern Hallier ».

Cependant, les plaintes déposées contre X n'ont pas été jugées recevables.

Edern Hallier connaissait-il le scandale du détournement des fonds de la Division Daguet ?...

Probablement, car, comme j’ai pu le constater, l’information était bien connue à l’Etat-major des armées à la fin 1997.

Il ne faut pas oublier que son père était général et que le fiston était tout désigné pour recevoir des informations sur le détournement des indemnités de la guerre du Golfe

Et de les rendre public.

Si c’est cela, il n’avait aucune chance de s’en sortir.

Les tueurs de Béré et Gros-Souvre étaient encore là, et terriblement dangereux…

 Fidèle, à sa réputation de ῝tête brûlée῝, Jean-Edern Hallier a vraisemblablement eu l’intention de révéler ce scandale.

 Peut-être l’a-t-il payé de sa vie…

 

 Ainsi, les journalistes d’un certain âge, comme Edwy Plenel, ont vécu dans une ambiance hostile absolument incroyable.

Ce qui explique la peur, pour ne pas dire la terreur, que provoque chez encore beaucoup de journalistes toute révolte, toute critique sérieuse du pouvoir.

Les ravages de l’horrible mentalité des années où l’Arsouille était au pouvoir se font encore sentir.

N’y voyez rien d’autre comme cause principale au mutisme de la presse et des médias sur le scandale du détournement des indemnités de la guerre du Golfe par François Mitterrand.

La peur sévit encore.

Mais le monde change, et les vieux schémas comportementaux sont en train de s’effondrer progressivement.

Les jeunes ne tolèrent plus cet aveuglement qui les condamne à vivre dans une société qu’ils rejettent.

Il suffit de lire un article récent du Monde sur le malaise d’une jeunesse qui rêve d’en découdre.

Comme Jean-Edern Hallier l’a fait ?...

 

Jean-Charles DUBOC

 

Commentaires

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Michel

Très bon article. Monsieur le Commandant de bord vous avez raté votre vocation de "vrai" journaliste de celui qui informe et non qui désinforme comme c'est le cas pour la très grande majorité étant sous la coupe de ceux qui nous gouvernent.

I-Cube

Pas mal, en effet.

Mais je ne suis sûr de rien, sur cette affaire-là, pour ma part.

Bien à vous : Je reviendrai lire en détail...

JEAN-CHARLES DUBOC
JEAN-CHARLES DUBOC

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